Interview : Christophe Minier, cap sur Harmonicas sur Cher

Comme vous le savez sans doute, le festival Harmonicas sur Cher, qui se déroule tous les deux ans à Saint-Aignan-sur-Cher, aura lieu cette année du 25 au 27 mai. Planet Harmonica en a profité pour poser quelques questions à Christophe Minier, sur son histoire et son organisation. Rencontre avec un passionné qui agit.

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PH: Bonjour Christophe,

tu es l’organisateur de l’unique festival d’harmonica en France. Raconte-nous : depuis combien de temps existe-t-il, et comment t’en es venue l’idée ?

Christophe: Le Festival Harmonicas sur Cher existe sous ce nom depuis mai 2003. En vérité je voulais le baptiser Harmonicas sur Terre, mais les copains m’ont dit que c’était trop mégalo et « Sur Cher » ancrait davantage l’évènement sur le territoire, puisque nous habitons Saint Aignan sur Cher, dans la vallée du Cher, dans le Loir et Cher ! Je regrette encore un peu d’avoir cédé parce que je me sens davantage citoyen du monde qu’accroché à mon clocher.
Pour revenir à la naissance du festival, il faut remonter deux années en arrière où j’avais organisé une soirée dans un bar « Le Chiquito » de Noyers sur Cher avec trois groupes invités, qui avaient tous un harmoniciste. Une formation de Jazz, une de Blues et une de Rock. Julien Cormier jouait avec le Kévin Texas Band et moi avec Meskal pour le Rock et l’atelier de Jazz de l’Association Médiator. Il y avait une trentaine de spectateurs, ce fut très sympa, et dans ma tête le concept était né. Et je pensais que j’étais le premier et le seul à avoir eu cette idée !
L’année suivante j’ai monté une soirée dans le même village, mais à la Salle des Fêtes, suivant le même principe avec le groupe de Julien Cormier, le duo « Little Bad Monkey » avec le fondateur de Planet-Harmonica à savoir Ben Felten accompagné à la guitare par Patrice Champaroux, et en tête d’affiche, pas dégonflé j’avais contacté Jean-Jacques Milteau qui devant mon amateurisme m’avait gentiment orienté vers le quintet de Greg Szlapczynski qui était tout jeune, tout mignon et qui composait des musiques à tomber par terre. La soirée a été triomphale et on a même dû refuser du monde. J’avais appelé cette soirée « Harmonic’all » (= tous les harmonicas).
Mais j’ignorais qu’à Condat existait déjà Les Harmonicales et Laurent Cagnon avec raison m’a suggéré de changer de nom pour éviter les confusions avec son festival.

Christophe Minier, (c) Jonathan Daitch

C’est donc comme ça que, grisé par le succès et le plaisir d’organiser une manifestation, j’ai voulu passer à la vitesse supérieure et organiser un vrai festival, sur deux jours dans une salle plus grande. La première année, ce fut le weekend du premier mai, puis en 2004 nous avons opté pour le weekend de l’Ascension qui offre la possibilité d’avoir trois jours de concerts (jeudi, vendredi et samedi) et un dimanche pour redescendre sur terre, ou de rentrer chez soi si on a beaucoup de route à faire. L’inconvénient de ce pont est qu’il bouge tout le temps, parfois début mai, jusqu’à début juin !

Alors, je suis à l’origine de ce festival mais il y a eu beaucoup de rencontres et de soutiens pour en arriver où nous sommes maintenant.

La première, et elle est déterminante, c’est l’Association Médiator créée par Simon Tardieux, à l’époque un tout jeune et génial touche à tout bourré d’énergie et de talent avec qui j’ai découvert le Jazz et l’organisation de manifestations.
C’est aussi au sein de cette association que j’ai rencontré des gens qui sont devenus les piliers du festival et quand parfois j’ai eu des grands moments de lassitude au point de vouloir tout arrêter, ils ont toujours été là pour me soutenir et m’encourager.
La réussite du festival tient autant à eux qu’à moi.

 

PH: Quel est le concept du festival, comment le situes-tu par rapport aux autres festivals d’harmo dans le monde ?

Christophe: Je ne connais pas les festivals du monde hélas à part les Harmonicales de Condat et HarmoLiège en Belgique mais ils ont arrêté, encore hélas.
Je suis allé une fois à celui de Bristol en Angleterre
Je ne suis jamais allé au festival de Trossingen. Et au-delà non plus.
Alors, j’ai quelques échos par les artistes qui ont pu se rendre dans différents festivals et en général ils nous font toujours des compliments (Hypocrites!?:-).

Le concept est simple : je veux des beaux et bons concerts et que les gens soient heureux. Les gens sont les spectateurs, les artistes et l’équipe de bénévoles avec moi dedans.
Nous avons la chance actuellement d’avoir des subventions publiques (Commune de St Aignan sur Cher, Communauté de Communes Val de Cher-Controis, Conseil Départemental du Loir et Cher et Région Centre) qui nous permettent d’être indépendants et d’organiser une manifestation à échelle humaine. C’est très important pour moi. Il m’a déjà été proposé de délocaliser le Festival dans une grande ville pour avoir une salle plus grande et faire plus d’entrées ! Je m’en branle.
Je veux juste rester dans ma vallée et y organiser des trucs positifs.

Je me souviens aussi d’un type qui était venu me voir en me disant qu’il avait boosté un festival dans le sud de la France et que maintenant il y avait des dizaines de milliers de spectateurs : Je lui ai demandé où on pourrait caser tout ce monde-là ? Et ensuite une grosse organisation est beaucoup plus compliquée à tenir. Non, c’est pas pour moi ! J’aime le contact d’homme à homme et m’amuser, pas me prendre la tête davantage.

 

PH: Comment se fait la jonction entre le village, ses habitants, les artistes et les festivaliers ?

Christophe: Jusqu’à présent ça s’est toujours très bien passé. Les gens d’ici adorent l’ambiance de ce festival. Ils disent que les festivaliers sont sympas, tranquilles et joyeux. De leur côté, les festivaliers disent que les autochtones sont accueillants, chaleureux et amicaux, que la ville est jolie et très agréable. Bisounours land !
Et c’est très positif pour nous parce que nous trouvons que notre ville est morte, qu’il ne s’y passe rien, et d’un seul coup des « estrangers » viennent nous dire le contraire. Faut dire que quand il y a le festival, la ville est vivante et j’aimerais tant que ce soit ainsi toute l’année !
Ce qui est certain, c’est que notre association a une bonne cote auprès des élus, nous leur apportons un bel évènement et nous avons toujours été soutenus par tous les maires qui se sont succédés (trois).
Côté artistes, il y a des trucs sympa, comme Paul Lassey qui a écrit un morceau qui s’appele « Saint Aignan » ; aussi dans un CD de Thierry Crommen on peut avoir une photo de lui et ses musiciens prise dans une rue de la ville, je repense aussi à Lucas Rocher qui a tourné un petit clip marrant. Certains sont devenus des bons copains comme Michel Herblin, JJ milteau ou Dam Dekwak, et plein d’autres encore qui font presque partie de la famille et de l’asso.

 

Tireux d’roche, (c) Christophe Le Toquin – Harmonicas sur Cher 2015

 

PH: Comment choisis-tu les groupes qui se produisent sur scène ? Y a-t-il un parti pris dans les choix musicaux ? Une esthétique particulière ?

Christophe: Je choisis effectivement les groupes, je demande souvent conseil à Julien Cormier, on me fait aussi beaucoup de propositions et j’écoute un peu tout ce qui passe sur le web, et à ce sujet je regrette le temps béni où il y avait la liste de discussion « Harmonicaland » (pas le magasin en ligne qui a utilisé ce même nom, pas interdit mais pas sympas les mecs) car c’était très pratique et moins chronophage que les forums ou FaceBook maintenant (c’était ma minute vieux con).

Comment je choisis ?
Je fais une première liste avec tous les artistes qui m’ont plu, ceux qui m’ont sollicité ou ceux dont on m’a parlé. J’essaye quand c’est possible d’aller les voir sur scène ou de discuter avec des copains qui les ont vus.
Ensuite je resserre mon choix à une vingtaine de possibles. Puis je compose avec les styles musicaux, les disponibilités des artistes, les fiches techniques et aussi les budgets. Au final il ne reste qu’une dizaine d’artistes à qui annoncer la bonne nouvelle, ça c’est le plus sympa. Et une autre dizaine à leur dire que c’est pas pour cette année, et ça c’est une horreur, j’aimerais tant programmer tous ceux que j’aime bien.
Et le fait de faire le Festival tous les deux ans n’arrange pas les choses.
Toots n’est jamais venu, Stevie Wonder pas encore.

Le parti pris est celui de l’éclectisme et de la « qualité ».
J’ai des goûts musicaux éclectiques et il y a aussi beaucoup de spectateurs qui en ont, et c’est vraiment sympa de découvrir des musiques qu’on n’entend pas souvent. Nous avons vibré avec des musiques japonaises, africaines, québécoises, tziganes, etc, c’est aussi dépaysant qu’un voyage à l’étranger.

Pour ce qui concerne la qualité, ça ne veut pas dire grand-chose, mais je reçois beaucoup de propositions qui ne sont pas encore à la hauteur d’un festival comme le nôtre. Alors j’essaye de dire sans blesser qu’il y a encore du chemin et du travail, et de donner rendez-vous à une prochaine fois. Mais globalement, il y a beaucoup de très bons artistes en France et partout dans le monde.
Je suis curieux de nature et j’aime bien quand je trouve un truc qui sort des sentiers battus, et cette année ça va être le cas !

J’essaie de programmer des artistes sincères et généreux, d’aider à faire connaître ceux qui débutent, puis de continuer à les suivre et d’avoir le plaisir de les voir revenir. J’essaie d’éviter les fâcheux et les casse-bonbons, c’est rare.

 

PH: Quel est le programme de cette année, et quelles sont les activités hors concerts ?

Christophe: Le programme me plaît beaucoup ! 🙂

Le voici, un peu « sec », mais chacun pourra trouver des liens sur la toile vers tous ces artistes. Notre site va bientôt être mis à jour (cf www.harmonicasurcher.com).

De même pour les animations, tout n’est pas calé, mais on pourra trouver des masterclass, une brocante musicale, des jams plus ou moins improvisées, une exposition, peut-être des luthiers, des marchands, etc.

 

PROGRAMME : 25 au 27 mai 2017

 

Jeudi 25 mai 2017
18H00 vernissage de l’expo à la prévôté et ouverture officielle du festival
20H00 concert salle des fêtes 1ere partie ZANELLA TRIO (Jazz & World Music)
22h00 concert salle des fêtes 2eme partie CORY SEZNEC (Folk-Blues)
0h00 Boeuf Jam

 

Vendredi 26 mai 2017
16H30 concert à la Prévôté ELLA FOY (Folk-Pop)
20H00 concert salle des fêtes 1ere partie GERALD LAROCHE (harmonisons)
22h00 concert salle des fêtes 2eme partie WILLIAM GALISON & KARIM MAURICE (Jazz)
0H00 Boeuf Jam

 

Samedi 27 mai 2017
15H00 spectacle SOUFFLES DU MONDE (Manu Bosser – harmo voyageur, lieu à définir)
16H30 concert à la Collégiale JEAN SABOT & LAURENT LE BOT (Trad)
18H00 concert place de l’Ormeau 2J’s & SEE (Blues)
20H00 concert salle des fêtes 1ere partie LIOUANE
22h00 concert salle des fêtes 2eme partie MOUNTAIN MEN (Blues)
0h00 Boeuf Jam

 

PH: Un dernier mot que tu voudrais ajouter ?

Christophe: VENEZ NOMBREUX :-))