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Harmonica et santé

L’harmonica, instrument… thérapeutique !L'Origine du Programme

Comme beaucoup, je joue de l’harmonica depuis de nombreuses années, et, comme beaucoup, mon parcours d’harmoniciste a été ponctué de nombreuses rencontres. L’harmonica est en cela magique qu’il suffit de le sortir d’une poche pour que les sourires s’affichent sur les visages des personnes qui vous entourent, vous en avez sûrement déjà fait l’expérience.

L’une des rencontres les plus enrichissantes que j’ai faite grâce à l’harmonica est sans doute celle de Michel Fedrizzi, guitariste, auteur-compositeur-interprète français, malheureusement trop peu connu du grand public. En effet, c’est à son initiative que je suis entré en contact avec l’Association “Planète clé de Sol” qui planifie et finance l’intervention de musiciens en milieu hospitalier sur la région nancéenne. A l’époque, il y a environ deux ans, je lui avais confié que je trouvais l’expérience de Jean-Jacques Milteau et de Greg Szlapczynski à Paris très intéressante et il m’a tout simplement proposé d’en parler aux responsables de l’Association, lesquels furent immédiatement séduits par l’idée.

Personnellement, je ne connaissais pas le contenu exact de l’intervention de Jean-Jacques de de Greg, mais il me paraissait logique d’essayer de joindre l’utile à l’agréable et d’utiliser l’harmo pour aider les enfants souffrant de difficultés respiratoires, et particulièrement d'asthme. J’ai donc rencontré à la fois les responsables de l’Association “Planète clé de Sol”, les responsables de l’hôpital d’enfants de Nancy-Brabois et les professeurs Monin et Vidailhet, et leur ai proposé d’utiliser l’harmonica à des fins thérapeutiques.

Connaissant très mal la maladie, je n’avais franchement pas d’idée précise sur les exercices à faire effectuer aux enfants et je ne savais pas à quel point l’harmonica pourrait leur être utile.

C’est donc grâce à ma collaboration avec une infirmière puéricultrice, Brigitte Recroix, que se sont élaborés les “exercices” destinés aux enfants : Brigitte s’est chargée de m’informer sur l'asthme, tandis que je l’informais sur la pratique de l’harmonica. Dotée d’une grande expérience de la maladie, Brigitte a immédiatement “ciblé” l’utilisation de l’instrument sur l’éducation des enfants quant à leur prise de médicaments.

L’harmonica allait donc devenir, à Nancy, l’un des outils les mieux adaptés pour venir en aide à un enfant souffrant de difficultés respiratoires. En effet, c’est un allié pédagogique pour une meilleure prise de conscience du souffle. C’est le seul instrument dans lequel, pour jouer , il faut souffler et aspirer …

Comment ça se passe ?

Une fois par semaine, je rencontre donc des enfants souffrant d’asthme et de mucoviscidose. Ces rencontres ont lieu dans les locaux de “l’Atelier du souffle” tout réçemment réalisés grâce à d’importants fonds privés. Encadrés par Brigitte Recroix et par moi-même, les enfants doivent apprendre à mieux respirer, à mieux gérer leur souffle.

En musique, avec l’harmonica, je leur apprends :

            Tu aspires… tu tiens la note longtemps, tu bloques ta respiration pendant 5 secondes.

            Tu expires longtemps par le nez pour vider tes poumons” .

L’intensité sonore de l’harmonica est un repère. Les enfants peuvent mieux ENTENDRE la durée de leur inspiration. Cet apprentissage par l’harmonica leur permet ensuite de beaucoup mieux utiliser l’appareil de soin si important pour améliorer leur état.

"L'asthme demeure encore la maladie chronique la plus fréquente chez l'enfant. Les dernières années ont été témoins d'une augmentation de la mortalité et de la morbidité liées à l'asthme partout dans le monde. Parallèlement à cette recrudescence de l'asthme, notre compréhension de la maladie s'est améliorée au cours des récentes années. Nous savons maintenant que l'asthme chez l'enfant est , avant tout, une maladie inflammatoire" (Barnes,1989).

PRINCIPAUX FACTEURS DECLENCHANTS

A la maison

        - allergènes : animaux, acariens, etc...

        - tabagisme actif et passif

        - type de chauffage

        - taux d'humidité. 

A l'extérieur

        - exposition aux allergènes (animaux chez des amis ou des parents, pollens)

        - infections respiratoires

        - exercices, air froid

        - tabagisme passif.

          

Autres

         - intolérance à l'aspirine

        - additifs alimentaires (sulfites, glutamate monosodique, etc...)

        - émotions et tensions

        - reflux gastro-oesophagien.

Vers une meilleure qualité de vie

"L'asthme peut être maîtrisé dans la mesure où la personne asthmatique a accès à des traitements médicaux appropriés et qu'elle peut, par des interventions éducatives pertinentes, participer activement à ces traitements et à la prévention des crises d'asthme. L'éducation des personnes asthmatiques vise essentiellement l'amélioration de leur qualité de vie. Elle vise également à faciliter l'apprentissage de moyens pour réduire les symptômes de la maladie par une médication appropriée, l'adoption d'habitudes de vie et un environnement qui risquent moins de déclencher les crises d'asthme" (Boutin et Boulet, 1993).

Il n'y a pas de recette magique ni de "trucs" infaillibles applicables à toutes les situations. Il y a plutôt des principes théoriques qui peuvent guider la création de programmes éducatifs pour les asthmatiques et favoriser ainsi une plus grande efficacité du traitement et des mesures préventives.

Les inhalateurs

Chez les enfants asthmatiques, l’efficacité des produits inhalés est fonction de la dose déposée dans l’arbre bronchique. La quantité du produit actif déposé dépend du nombre de particules produites et de leur caractéristiques, du type de respiration (débit inspiratoire, pause, etc.), de l’anatomie et de la géométrie des voies aériennnes. Afin de bénéficier de toute l’efficacité des médicaments anti-asthmatiques, qui sont pour la plupart administrés par inhalation, nous devons tout d’abord bien connaître les méthodes d’utilisation des inhalateurs.

C’est pourquoi Brigitte Recroix explique aux enfants le fonctionnement de leur inhalateur . Géneralement, les enfants de plus de 11 ans utilisent un “Ventodisk”, un”Diskus” ou autre “TurboHaler”, les plus jeunes , des “Chambres d’inhalation”. Quelque soit l’inhalateur utilisé, l’enfant doit apprendre à bien s’en servir.

Voici quelques modèles de chambres d’inhalation

Une aérochambreMD utilisée chez l’adulte et l’enfant de plus de 5 ans. Muni d’une valve unidirectionnelle qui fait obstacle aux plus grosses particules et diminue la perte du médicament. 

Une aérochambreMD pour enfants de 1 à 5 ans (avec masque). On suggére de 5 à 10 respirations consécutives.

Une aérochambreMD pour nourrissons (avec masque).

VentahalerMD  Chambre transparente de volume 750 ml. Il s’agit d’un dispositif conique muni d’une valve unidirectionnelle. Le rôle de cette valve est de retenir le médicament dans le dispositif d’espacement jusqu’à ce que le patient soit prêt à l’inhaler.

La prise du médicament

Elle implique que l’enfant inspire longtemps et profondément le médicament, qu’il bloque sa respiration pendant 5 secondes, de façon à ce que le produit se diffuse bien dans l’arbre bronchique, puis, qu’il expire longtemps et profondément par le nez. Pour les enfants de moins de cinq ans, on suggère plusieurs respirations consécutives. C’est donc en amont de cette technique de prise de médicament que je fais intervenir l’harmonica afin d’aider les enfants à mieux prendre conscience de ce qu’ils devront faire lorsqu’ils utiliseront leur ihnalateur.

Je leur demande donc de jouer une note longue en aspirant dans l’harmonica… de bloquer leur respiration pendant 5 secondes…puis enfin d’expirer par le nez, longtemps, sans qu’une note ne résonne ! Bien sûr, j’agrémente l’exercice de petits airs sympas !

Charline et le Géant

Lorsque Charline, 6 ans, doit prendre son médicament, elle doit inspirer longtemps, afin que tout le produit se diffuse profondément dans ses poumons. Or, elle ne respire que par petits à-coups, et croit ne pouvoir respirer ni plus fort ni plus longtemps. Elle pense se faire mal en aspirant plus fort.

Je me suis donc tout d'abord attaché à détouner son attention de la douleur en lui apprenant à souffler et à aspirer dans son harmonica et en lui jouant un petit air de musique. Ce premier contact avec l’harmonica se passait très bien, mais elle soufflait et aspirait si faiblement dans l’instrument que si elle avait dû prendre son médicament à ce moment, la quantité de produit qu’elle aurait inhalé n’aurait pas été suffisante pour atteindre son efficacité maximale.

Je lui fis donc remarquer que seule une petite souris passant dans les environs pouvait entendre sa musique. Si un géant venait à passer près de l'hôpital, lui qui a des oreilles si haut là-haut dans le ciel, ne pourrait sans doute pas l'entendre et serait sûrement très triste !!! Je lui ai demandé qu'elle joue plus fort et plus longtemps pour que le géant puisse lui aussi l'entendre ! Et soudain, sans se soucier de la douleur qu'elle avait peur d’éprouver quelques secondes auparavant, elle aspira beaucoup plus fort,  pour faire plaisir au géant… au cas où …

J’ai vu dans ses yeux qu’elle venait de se rendre compte de ce qu’elle venait d’accomplir. Bien sûr, elle a compris qu'elle pouvait inspirer sans se faire mal, et je lui ai expliqué que tout l'air qu'elle venait d'aspirer pour jouer de l'harmonica au géant, elle pourrait forcément l'aspirer à chaque fois qu’elle prendrait son médicament. Charline est rentrée chez elle quelques jours plus tard, avec son harmonica en poche, toute heureuse de montrer à sa maman l'air que je lui avais appris.

En bref…

Chaque semaine, l’harmonica vient à la rencontre d’enfants et les aide un peu à mieux vivre leur traitement. Chaque semaine, ces enfants rentrent chez eux avec un harmonica offert, une fois encore, grâce à des dons. Si vous voulez participer, envoyez vos dons à “L’atelier du souffle”, Hôpital d’enfants de Nancy-Brabois 54000 Nancy-France. Toute participation financière, même minime, est la bienvenue !

L’hôpital de Nancy-Brabois admet, chaque année, environ 600 enfants asthmatiques. Certains ne restent qu’une journée, d’autres, après une crise peut-être un peu plus importante, peuvent y rester plusieurs jours. Je ne suis, pour l’instant, présent à l’hôpital qu’un jour par semaine, ce sont donc généralement ces enfants là que je rencontre. La rencontre avec l’harmonica, et la formation qui en découle sur la bonne utilisation de la médication n’est pas obligatoire et nous ne pouvons exiger des parents qu’ils amènent régulièrement leurs enfants afin d’effectuer un suivi efficace. Cependant, si l’information circule bien, chacun devrait prendre conscience du réel impact de l’harmonica sur l’éducation des enfants concernant uniquement, bien sûr, la bonne prise de leur médicament.

Les médicaments sont efficaces… A condition qu'ils soient pris dans des conditions optimales : l'harmonica peut réellement aider les enfants à en prendre conscience et à faire eux-mêmes ce qu'il faut pour mieux se soigner.

Si vous avez déjà offert un harmonica à un enfant, vous avez sûrement remarqué cette étincelle et cette émerveillement dans ses yeux… Si vous ne l’avez pas encore fait… il est encore temps !

Paul Lassey, Nancy-France.

http://paul.lassey.free.fr/

(Trad Kit Weston)